Selon un rapport de l’Initiative mondiale contre la criminalité transnationale organisée, les groupes djihadistes actifs au Sahel et en Afrique de l’Ouest exploitent désormais le vol de bétail comme source majeure de financement. Deux organisations sont particulièrement pointées du doigt : le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM), affilié à Al-Qaïda, et l’État islamique au Sahel (IS Sahel).
Au Burkina Faso, des villages entiers sont attaqués, leur bétail volé puis revendu à bas prix au Ghana et dans le nord de la Côte d’Ivoire. Certains animaux servent même de monnaie d’échange contre des motos ou du carburant, facilitant les approvisionnements logistiques des groupes armés.
« Ces transactions permettent aux djihadistes d’acquérir des ressources vitales et de r enforcer leur présence dans certaines communautés rurales », explique Flore Berger, chercheuse au sein de l’organisation à l’origine du rapport.
Le phénomène ne se limite pas aux seuls groupes extrémistes. Les Volontaires pour la défense de la patrie (VDP), supplétifs civils de l’armée burkinabè, sont également cités pour des cas de pillage lors d’opérations antiterroristes.
Selon Flore Berger, dans certaines zones anciennement contrôlées par les djihadistes, les habitants sont parfois considérés à tort comme complices, ce qui conduit à la confiscation abusive de leur bétail par des VDP ou même par des forces de défense.
Des mesures disciplinaires auraient été prises par les autorités, avec des sanctions et mutations de certains éléments impliqués.
Les conséquences sont dramatiques pour les éleveurs, premières victimes de ce trafic structuré. Privés de leurs troupeaux, certains perdent l’intégralité de leur patrimoine. Au Niger, un éleveur contacté par la DW témoigne : « Les djihadistes prennent tout. Les voleurs prennent tout. Même les forces de défense prennent tout. »
Dans ce contexte, la cherté de la viande dans la sous-région devient une conséquence directe de l’effondrement progressif de la filière.
Certains éleveurs, acculés par la misère, finissent par rejoindre les groupes armés.
Enfin, le rapport mentionne que Boko Haram, actif dans le bassin du lac Tchad, profite aussi de ces razzias de bétail pour financer ses activités dans le nord-est du Nigeria.
L’ampleur exacte du phénomène reste difficile à mesurer, mais les experts évoquent des milliers d’animaux volés et des centaines de millions de francs CFA détournés, dans un commerce illégal qui menace autant la sécurité régionale que la survie des communautés rurales.
Stella S.